La liberté d’expression dans l’entreprise.


Posté le 16 mai 2022

LA LIBERTÉ D’EXPRESSION DANS L’ENTREPRISE.

1 – Le principe du droit à l’expression. 

La Cour de Cassation rappelle régulièrement que la liberté d’expression est un droit fondamental garanti par l’article 11 de la déclaration des droits de l’homme.

La Cour de Cassation ajoute que ce droit s’applique y compris dans l’entreprise.

Ainsi, tout salarié peut librement exprimer son opinion, avis et même critiquer de manière constructive l’entreprise et/ou son manager et/ou ses collègues.

La critique doit néanmoins être pertinente et avoir un but de progrès. (Soc 28 avril 2021).

2 – Le lieu de l’exercice du droit.

Ce droit à l’expression peut s’exercer dans l’entreprise ou à l’extérieur. La Cour de Cassation précise que cela vaut dans tous les aspects de la vie sociale et même syndicale, le droit à liberté d’expression s’appliquant aussi sur internet.

Ainsi, un salarié peut s’exprimer sur son entreprise, dans les médias, et/ou Facebook Twitter ou autres.

La Cour d’Appel de VERSAILLES a ainsi récemment rappelé qu’un salarié peut exprimer un désaccord sur la politique commerciale de l’entreprise et cela ne justifie pas un licenciement. (CA VERSAILLES 16 février 2022).

3 – La limite au droit d’expression.

La Cour de Cassation fixe néanmoins usuellement une limite à ce droit. Il s’agit de l’abus.

Abus qui peut être caractérisé par des injures, des propos outranciers – excessifs ou diffamatoires, ou des propos dénigrants mettant la direction et/ou des collègues en cause.

La Cour de Cassation rappelle ces principes dans un arrêt du 16 février 2022 19-17871.

La Cour de Cassation le rappelle de nouveau dans l’arrêt « Tex » du 20 avril 2022 n°20-10852. L’animateur du nom de TEX fut licencié pour une blague sexiste à l’antenne. La Cour de Cassation estime que le licenciement pour faute grave de l’humouriste n’est pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression, ni même une atteinte au droit de faire des blagues.

4 – La sanction de l’abus du droit d’expression.

Un salarié faisant un usage excessif de son droit d’expression pourra être sanctionné y compris par un licenciement pour faute grave. (Soc 28 janvier 2016 ou 20 avril 2022 précité).

L’entreprise doit bien entendu moduler la sanction en fonction de la gravité de la faute commise et donc des propos tenus par le salarié.

5 – La sanction en l’absence d’abus.

Si l’entreprise sanctionne le salarié pour abus du droit d’expression, mais que l’abus n’est pas reconnu par la juridiction alors le licenciement est NUL.

Il s’agit d’une nullité pour violation d’un droit fondamental – Le droit d’expression. 

Cela permet au salarié d’obtenir des dommages et intérêts avec un minimum de 6 mois de salaire, mais sans plafond, le montant étant souverainement apprécié par les juges du fond. 

Les salariés disposent ainsi d’un droit d’expression dans l’entreprise mais ce droit n’est pas sans limite et l’employeur a la possibilité d’utiliser son pouvoir disciplinaire pour sanctionner les abus. 

En savoir plus sur le droit du travail…

Philippe SALMON

Avocat

DESS Droit des Affaires - DJCE

Spécialiste en droit du travail