LA RETENUE DE GARANTIE DANS LES MARCHES DE TRAVAUX


Posté le 23 janvier 2023

LA RETENUE DE GARANTIE DANS LES MARCHES DE TRAVAUX

La retenue de garantie et la caution solidaire qui peut s’y substituer ont pour objet de protéger le maître de l’ouvrage contre les risques d’inexécution ou de mauvaise exécution des travaux de levée des réserves à la réception.

Les dispositions de la loi n° 71-584 du 16 juillet 1971 prévoient qu’à l’expiration du délai d’une année à compter de la date de réception des travaux, faite avec ou sans réserve, la caution est libérée, même en l’absence de mainlevée, si le maître de l’ouvrage ne lui a pas notifié, par lettre recommandée, son opposition motivée par l’inexécution des obligations de l’entrepreneur.

La Cour de cassation vient de se prononcer dans un arrêt du 11 janvier 2023 destiné à la publication au Bulletin de Cour de cassation sur les conditions de mise en œuvre de la caution délivrée en substitution de la retenue de garantie de 5%.

La situation était la suivante.

1. Les faits

Une Société civile maître d’ouvrage d’un programme de logements à CAEN confie le lot plomberie, sanitaires, VMC, désenfumage mécanique à une entreprise qui lui remet un acte de caution personnelle et solidaire en substitution de la retenue de garantie de 5% délivré par la société BTP BANQUE.

L’entreprise est placée en redressement puis en liquidation judiciaire.

Après avoir déclaré sa créance, le maître d’ouvrage notifie la résiliation du contrat à raison de la cessation d’activité de l’entreprise en convoquant le liquidateur à la constatation des ouvrages exécutés, des matériaux approvisionnés ainsi qu’à l’inventaire descriptif du matériel de ladite entreprise.

Les procès-verbaux d’état des lieux dressés par huissier sont notifiés au liquidateur de la procédure collective.

Après avoir demandé vainement la mise en jeu de la garantie, le maître d’ouvragenotifie son opposition à la libération de la caution et a assigné en paiement la société BTP BANQUE.

Parallèlement, le maître d’ouvrage demande dans ses rapports avec l’entreprise de prononcer la réception des travaux exécutés à la date des constats d’huissier avec les réserves mentionnées sur les procès-verbaux de constat. Le Tribunal de commerce de CAEN puis la Cour d’Appel prononce la réception judiciaire des travaux à cette date.

La procédure contre la Société BTP BANQUE se poursuit. Le Tribunal de commerce tout comme la Cour d’Appel de CAEN condamne la banque au montant de l’acte de cautionnement, le coût de la levée des réserves était supérieur au montant du cautionnement.

La banque forme un pourvoi en considérant l’action du maître d’ouvrage comme irrecevable au motif que la réception a été prononcée postérieurement à la mise en jeu de la garantie et à la notification de l’opposition.

2. La solution de la Cour de cassation.

Ce pourvoi est rejeté au motif que la loi du 16 juillet 1971 ne distingue pas entre réception amiable, tacite ou judiciaire des travaux réalisés et que le délai à l’expiration duquel la caution est libérée ne peut commencer à courir avant la date de la réception. 

En l’occurrence, les conditions d’application de l’engagement de caution au bénéfice du maître de l’ouvrage étant réunies à la date à laquelle elle a statué puisque la réception a été prononcé judiciairement à effet rétroactif.

Cette décision est logique et conforme à l’esprit de la loi de 1971 sur les retenues de garantie.

Elle confirme la nécessité d’être bien accompagné par un avocat en droit de la construction dès le début d’un litige pour élaborer une stratégie propre à ses intérêts.

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Christine BAUGÉ

Avocat

DEA de droit privé

Activités dominantes en droit immobilier, droit de la construction et droit de la famille